mercredi 16 mars 2011

La Maison Blanche reste branchée nucléaire

Les événements catastrophiques du Japon ont ouvert un débat aux Etats-Unis sur la sécurité du programme nucléaire américain. Certains législateurs appellent à freiner la construction de nouvelles centrales mais l’administration Obama, soucieuse de développer les « énergies propres » et de réduire la dépendance du pays envers le pétrole étranger, y reste opposée.

Le Ministre de l'Energie Steven Chu,
 co-lauréat du Prix Nobel de Physique en 1997
 (Photo:Center For American Progress Action Fund)
« Pouvez-vous nous assurer que les explosions survenues dans plusieurs réacteurs de la centrale de Fukushima (suite au séisme et au tsunami de vendredi) ne peuvent pas arriver chez nous ? ». Question du député démocrate de l’Illinois Bobby Rush au Secrétaire d’Etat à l’Energie Steven Chu, lors d’une audition devant la commission de l’Energie de la Chambre ce mercredi à Washington. « Je peux vous assurer que nous allons regarder de très près ce qui se passe au Japon et tirer toutes les leçons qui doivent être tirées », a répondu le représentant de la Maison Blanche.

Et d'ajouter que les centrales nucléaires américaines ont été construites « sur base de critères de sécurité extraordinairement élevés pour faire face aux tremblements de terre, aux tempêtes et aux attaques terroristes » et que « si certains critères doivent être renforcés ils le seront ». L’administration Obama reste donc pour l'heure entièrement « engagée » dans la poursuite de son programme nucléaire. Elle continue notamment à défendre l'adoption par le Congrès d'une enveloppe de 36 milliards de dollars de garanties de prêts fédérales en 2011 pour la construction de nouvelles centrales (18,5 milliards ont déjà été alloués en 2010). 

Proposition d'un moratoire temporaire

Un optimisme qui ne semble toutefois pas partagé par tout le monde, notamment dans le camp démocrate. Les Américains ont en effet le premier parc nucléaire au monde avec 104 réacteurs, dont la plupart sont concentrés sur la moitié Est du territoire. Une partie de ces centrales ont été construites, dans les années 1960-70, sur des zones à forte activité sismique comme la Caroline du Sud ou la Californie. Certaines d’entre elles sont en outre du même modèle que la centrale japonaise aujourd'hui en difficulté.

Dans ce contexte, plusieurs législateurs ont appelé à revoir les dispositifs de sécurité des différents sites. Le sénateur indépendant du Connecticut Joe Lieberman a réclamé un « moratoire temporaire sur la construction de centrales nucléaires aux Etats-Unis », alors que des demandes pour exploiter 20 nouvelles centrales sont actuellement sur la table. Lieberman précise être un partisan du nucléaire, qui reste à ses yeux une source d’énergie « domestique et propre ». Il ne souhaite donc pas arrêter définitivement la construction de centrales mais simplement y « mettre un frein jusqu’à ce que l’on comprenne les ramifications de ce qui se passe au Japon ».

Le député démocrate du Massachusetts Ed Markey, membre de la commission de l'Energie à la Chambre des représentants, estime de son côté que les Etats-Unis sont aussi « vulnérables » que le Japon et qu’il convient de « mettre en veilleuse tout projet d'installation nucléaire devant être aménagé dans une zone à forte activité sismique ». Markey propose en outre de moderniser les dispositifs de sécurité des réacteurs déjà situés dans des zones d’activité sismique. Les leaders démocrates de la commission de l'Energie ont quant à eux appelé à l'ouverture d'une enquête afin de déterminer si les centrales nucléaires du pays peuvent faire face à des séismes majeurs ou des tsunamis.

Three Mile Island dans les mémoires

Mais les élus républicains, largement en faveur d’une expansion du nucléaire aux Etats-Unis, ne semblent pas du tout sur la même longueur d’onde et ont mis en garde contre un jugement trop hâtif dans la situation émotionnelle actuelle. Le chef de la minorité républicaine au Sénat, Mitch McConnell (Kentucky), a expliqué sur FoxNews que le plus important restait de « nous libérer de notre dépendance envers le pétrole étranger », ajoutant que ce n’était pas le moment adéquat pour prendre des décisions politiques internes.

Jimmy Carter quittant le site de Three Mile Island
(Photo: President's Commission
 on the Accident at Three Mile Island)
L’administration Obama, soucieuse d'investir dans ce qu'elle considère comme une « énergie propre » et « créatrice d'emplois », va donc tenter de maintenir sa politique sur le nucléaire tout en assurant à ses alliés démocrates et à l'opinion publique  que toutes les mesures de sécurité seront prises. Le pays reste profondément marqué par l’accident nucléaire de Three Mile Island (Pennsylvanie) survenu en 1979, sous l'administration Carter, au cours duquel le coeur de l'un des réateurs avait en partie fondu. Peu après cet incident qui n'a fait aucune victime, la construction de nombreux réacteurs similaires à celui de Three Mile Island fut arrêtée. Avec la catastrophe bien plus grave de Tchernobyl (Ukraine) en 1986, les Etats-Unis décidèrent de littéralement mettre un terme à leur programme nucléaire.

Ce n’est qu’en 2005 que la « renaissance nucléaire » eut lieu aux Etats-Unis lorsque le Président républicain George W. Bush décida de visiter la centrale de Calvert Cliffs, dans le Maryland, pour encourager la construction de nouveaux sites. Quelques semaines plus tard, le Congrès adopta l’Energy Policy Act, comportant une série de mesures incitatives pour la construction de centrales. Loin de prendre le contre-pied de Bush en la matière, le démocrate Barack Obama renforça cette tendance peu après son arrivée à la Maison Blanche en 2008. Il distribua notamment à différents opérateurs les 18,5 milliards de prêts-garanties qui  avaient été votés sous Bush mais n'avaient pas encore été alloués. Obama continue aujoud'hui de prôner le nucléaire comme une « partie très importante du mix énergétique » (20% de la production d'électricité des Etats-Unis).

Et l'Europe dans tout ça?

Dans la foulée des événements du Japon, l’Union européenne a de son côté décidé de lancer des tests de résistance sur ses centrales nucléaires durant le deuxième semestre 2011. Le gouvernement allemand a par ailleurs annoncé mardi la fermeture immédiate et pour trois mois de tous les réacteurs mis en service en Allemagne avant la fin 1980 (au nombre de sept), dans l’attente d’une évaluation des risques. 

1 commentaire:

  1. Par contre en France, il n'y a pas de débat politique, le PS reste muet comme une carpe si bien qu'europe ecologie a souligné qu'une entente pour la présidentielle serait difficile entre les deux partis. pendant ce temps le gouvernement nous dit que nous avons le meilleur matériel au monde et que tout accident est impossible...oh langue de bois quand tu nous tiens...

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