mercredi 9 mars 2011

Mike Huckabee: le pari des républicains en 2012?

Si le candidat démocrate pour les élections présidentielles américaines du 6 novembre 2012 ne fait pas l’ombre d’un doute, aucun « leader » n’a pour l’instant véritablement émergé du côté républicain. Une situation inédite depuis 1952 qui témoigne d’une crise d’identité du parti de l’éléphant.  

La liste est longue : dans un sondage réalisé fin février par l’institut Gallup auprès de 1326 républicains et indépendants, pas moins de douze noms sont retenus pour devenir de potentiels candidats aux primaires du parti républicain qui débuteront en janvier 2012. Mais aucun ne parvient à franchir la barre des 20%. Seuls trois se détachent légèrement du lot : Mike Huckabee recueille 18% des voix, suivi de Mitt Romney et Sarah Palin tous deux bloqués à 16%. Qui sont ces trois « présidentiables » en puissance?

Le premier, Mike Huckabee, 56 ans, était gouverneur de l’Arkansas de 1996 à 2007 et candidat malheureux à l’investiture républicaine pour les présidentielles de 2008 (il arriva troisième derrière John McCain et Mitt Romney). Aujourd’hui présentateur vedette d’une émission sur Fox News, cet ancien pasteur baptiste, sceptique quant à la théorie de l’évolution, a récemment déclaré sur une station de radio newyorkaise qu’en « ayant grandi au Kenya », les « vues du Président Obama, sur les Britanniques par exemple, sont très différentes de celles de l’Américain moyen », ajoutant qu’il aimerait « en savoir plus sur l’endroit exact où le Président est né ».

Palin a perdu des points depuis Tucson

Huckabee a dû, quelques jours après, revenir sur ses propos car Barack Obama est né et a grandi à Hawaii (avec un passage par l’Indonésie), son père étant Kenyan et sa mère Américaine. Le potentiel candidat s’est également illustré en affirmant devant des étudiants en journalisme qu’autoriser le mariage gay était comme légaliser l’inceste, l’usage de drogues ou la polygamie, arguant au passage que les couples de même sexe ne peuvent pas élever d’enfants car ces derniers « ne sont pas des chiots ». Il a par ailleurs critiqué l’actrice oscarisée Natalie Portman pour sa « grossesse visible » alors qu’elle n’est même pas mariée.


Mike Huckabee interviewé
en direct à la télé le 28 février

Derrière Huckabee, arrive Mitt Romney, 64 ans, businessman élevé dans la foi mormone, qui fut gouverneur du Massachusetts de 2003 à 2007. Sur le plan politique, Romney apparaît plutôt comme un modéré - il était d’ailleurs indépendant avant d’entrer en politique en 1994. A cette époque, il se disait conservateur fiscal (pour la restriction des dépenses et des taxes) et tolérant sur la question des droits civiques comme l’avortement ou les droits des homosexuels. Toutefois, ses positions en matière sociétale (IVG, mariage gay, recherche sur les cellules souches, etc.) sont devenues opportunément plus conservatrices à la fin de son mandat de gouverneur et au moment de sa candidature pour les primaires du parti républicain début 2008. Romney semble aujourd'hui plus motivé que jamais pour se lancer à nouveau dans la bataille et a déjà amassé beaucoup d’argent pour sa future campagne.

Enfin, en troisième position, on retrouve l’incontournable Sarah Palin, 47 ans, gouverneure de l’Alaska de 2006 à 2009, qui aurait pu devenir vice-Présidente des Etats-Unis si John McCain avait été élu à la Maison Blanche en 2008. Alors qu’elle figurait jusqu’il y a peu encore comme la future nominée républicaine de 2012, l’égérie du Tea Party semble avoir laissé des plumes dans la fusillade tragique de Tucson, en janvier dernier, qui a fait six morts et blessé à la tête la parlementaire démocrate d’Arizona Gabrielle Giffords. Palin a en effet été fermement critiquée pour avoir diffusé des messages violents durant la campagne pour les élections de mi-mandat en novembre, en publiant notamment sur Internet une carte des cibles à éliminer qui pointait dans un viseur de revolver plusieurs districts aux mains des démocrates dont celui de Giffords. Même si Palin a nié ces accusations et retiré le site incriminé, elle a, semble-t-il, perdu des points dans les sondages.

Les dégâts de l'administration Bush

Le sondage Gallup laisse apparaître plus loin derrière ces trois présidentiables une dizaine d’autres candidats potentiels dont l’ex-président de la Chambre des représentants Newt Gingrich (9%), le parlementaire du Texas Ron Paul (5%) ou la députée du Minnesota Michele Bachmann (4%) qui avait ostensiblement délivré en janvier la réponse du Tea Party au discours sur l’état de l’Union du Président Obama, se démarquant de la réponse officielle des républicains (malheureusement pour elle, elle regardait la mauvaise caméra…). Au final, aucun « front runner » (coureur de tête) ne se dégage à ce stade, ce qui n’est plus arrivé depuis 1952. Lors des dix courses républicaines ayant eu lieu entre 1952 et 2008, à chaque fois une figure s’est détachée du lot à cette étape de la campagne et dans la plupart des cas elle a remporté les primaires qui ont suivi. 2008 est la seule année où le nom du candidat final, en l’occurrence John McCain, a émergé si tard.

Cette dispersion des voix et cette absence de leader naturel ou charismatique révèlent une perte de repère de l’électorat conservateur ainsi qu'une crise d'identité du parti républicain qui cherche à se redéfinir après les huit années impopulaires d’administration Bush. L’émergence du Tea Party y est sans doute aussi pour quelque chose car si ce mouvement populiste et anti-taxation a redynamisé le parti républicain, elle l'a également déchiré en son sein - les nouveaux élus Tea Party tentant sur bien des aspects de se démarquer de leurs confrères traditionnels (on l'a vu dernièrement dans les négociations budgétaires). Toutefois, certains experts prédisent que le parti républicain reviendra en force en 2016 avec des candidats redoutables notamment issus du Tea Party - comme le sénateur de Floride Marco Rubio - qui sont aujourd'hui trop jeunes en politique pour se présenter. 

Mais pour l'heure, la situation reste plus que favorable à Barack Obama qui est le seul candidat démocrate à ce stade, même si sa candidature n'a pas encore été officiellement annoncée.

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