lundi 24 janvier 2011

Discours sur l'état de la désunion

Le discours sur l’état de l’Union mardi sera une mascarade d’unité nationale. Barack Obama appellera au rassemblement sur les enjeux économiques tandis que républicains et démocrates s’assiéront pour la première fois côte à côte pour écouter le Président. Mais les deux partis se haïssent toujours autant et le Congrès n’a jamais été aussi divisé.

Deux cent vingt-et-un ans après le tout premier discours sur l’état de l’Union prononcé par George Washington, Obama va pour la troisième fois de son mandat procéder à cet exercice annuel devant le Congrès. En direct sur toutes les télévisions et radios du pays, le Président démocrate s’adressera à ses compatriotes en se positionnant clairement au centre du spectre politique. « Son objectif sera de convaincre non pas les démocrates ni les républicains, mais les indépendants qui pourraient voter pour lui en 2012 si l'économie se redresse », explique Byron, ex-activiste de la campagne d’Obama en 2008.

La fameuse allée centrale par où arrive le Président
(Crédit photo: U.S. government work)
Pour ce faire, le Président prônera le rassemblement plutôt que les querelles partisanes. Une attitude qui lui a dernièrement valu des points dans les sondages. Son discours du 12 janvier à Tucson en Arizona, peu après la fusillade ayant coûté la vie à six personnes, a été grandement apprécié à gauche comme à droite. Obama a également réussi en décembre à faire passer d’importants compromis bipartisans comme le renouvellement du traité START sur le désarmement nucléaire ou la loi sur les réductions d’impôts.

Il devrait donc poursuivre sur cette voie lors de son discours de mardi soir (21h heure locale) en mettant l’accent sur la nécessité de relancer la compétitivité du pays et réduire le taux de chômage scotché à plus de 9%. « Il est clair que nous faisons face à une période qui nécessite une vision sur la façon dont nous, en tant que peuple, pourrons regagner le futur », a-t-il déclaré ce weekend. Le Président insistera aussi sur les retombées positives et concrètes de sa réforme de la santé adoptée en 2010, que les républicains tentent d’abroger. Si Obama dispose sur cette question d’une « deuxième chance de faire le premier effet », selon l’expression d’un député, il devrait appeler démocrates et républicains à travailler ensemble sur certaines parties de la loi qui pourraient être améliorées sans revenir en arrière.

Objectif: serrer en direct la main du Président

Son auditoire sera également en apparence bipartisan, puisque pour la première fois les membres des deux partis se mêleront les uns aux autres dans l’hémicycle du Capitole. L’idée a été lancée par le sénateur démocrate du Colorado Mark Udall dans la foulée des événements de Tucson, afin de rappeler le sens de civilité lié au mandat d'un membre du Congrès. En théorie, aucune règle ne précise où doivent s’asseoir les élus durant le discours sur l’état de l’Union mais traditionnellement les républicains monopolisent les rangs de gauche et les démocrates ceux de droite. Exception faite de ceux qui arrivent trois heures avant afin de réserver une place près de l’allée centrale et être certains de serrer la main du Président devant les caméras de tout le pays…

Une majorité d’élus pourraient donc suivre mardi la nouvelle pratique « bipartisane » mais cela restera « plus symbolique qu’autre chose », commente un expert politique, car dans le fond les sentiments ne changent pas : « républicains et démocrates se détestent toujours autant en privé ». Le Congrès n’a même jamais été aussi divisé qu’aujourd’hui. Après les élections de mi-mandat du 2 novembre, la majorité à la Chambre s’est renversée au profit des républicains alors que le Sénat a conservé sa majorité démocrate. Cette division n’est plus arrivée depuis 1987. Les votes au sein du nouveau Congrès sont ainsi devenus plus difficiles, les deux chambres tentant chacune de se barrer la route. La polarisation politique qui a suivi la crise économique et fait émerger des mouvements extrêmes tels que le Tea Party ne facilite pas non plus les choses. 

Des alliés Tea Party embarrassants

Ce n’est donc pas un hasard si les républicains ont choisi de désigner le tenace président de la commission des budgets de la Chambre des représentants, Paul Ryan (Wisconsin), pour répondre en leurs noms à Obama juste après son discours. A 40 ans, cet expert aux dents longues compte attaquer de front le Président sur la question des dépenses du gouvernement et du déficit du pays, alors qu’Obama devrait annoncer de nouveaux investissements publics dans l’éducation notamment.

Mais le parti républicain souffre de divisions internes qui pourraient lui coûter cher à l'avenir. Ses membres Tea Party ont en effet préféré choisir une autre personne pour répondre au discours du Président : la députée du Minnesota Michele Bachmann, qui rêve déjà de devenir la nouvelle Sarah Palin. Une situation embarrassante pour les leaders du parti républicain qui ont déclaré que « la seule réponse officielle » serait celle de Paul Ryan.

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